28 août - 23 octobre 2021

Hijack city

Galerie de la Scep, Marseille (FR)

Type

Commissariat d'exposition

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Communiqué de presse

Quasiment rien n’est accroché au mur dans l’espace d’exposition. Trois artistes, trois oeuvres, trois attitudes différentes y cohabitent. C’est aussi trois engagements qui s’y rencontrent. Samir Laghouati-Rashwan a un engagement politique, sans conteste, dans ses gestes plastiques. Il rend compte de ses investigations (histoire de la colonisation, histoire économique, conditions de détention en prison, répression policière etc) et invoque les injustices qui peuvent déranger, en général il s’en prend aux personnes qui ont le pouvoir et ne le partage pas. Son quotidien semble être un combat contre le mépris et l’inconsidération, qu’il n’hésite pas à mettre en lumière. Anita Molinero sculpte dans le danger, le feu, le plastique, l’industrie pétrochimique, elle est impliquée dans une urgence de la sculpture, sûrement par analogie avec une urgence concernant les matériaux qu’elle a l’habitude d’utiliser et les violentes détériorations qu’elle opère dessus. Toute la subtilité se trouvant sûrement dans sa propre formule : “Un rêve pour moi ,un cauchemar pour tous”. Arnaud Vasseux pratique selon moi une sculpture discrète, délicate, souvent extrêmement fragile. Son oeuvre, comme celle des deux autres, regarde son époque et s’engage d’une manière très secrète. On y décèle une intemporalité du geste humain, du comportement d’un matériau en tant que corps, du désir optique et du regard haptique (la perception du sens du toucher par la projection du corps dans son environnement). Réunir trois artistes permet de ne pas se laisser tenter par une dialectique binaire. Ici, une grille assemblée faîte de modules de sommier semble peser au-dessus de nos têtes (fragments de Dead Park, Samir Laghouati-Rashwan, 2018-2021). Là, un filet de sécurité servant pour les échafaudages semble vivre ses derniers instants (Sans titre, Arnaud Vasseux, 2019). Plus loin, un amas de plastique dégoulinant nous rappelle ces plots abandonnés de chantier ou d’autoroute (Oyonnax (série), Anita Molinero, 2009). Toutes ces oeuvres révèlent une sensibilité pour ces éléments récurrents dans l’espace urbain, jetables, échangeables, salissables, fonctionnels, éléments souvent situés au degré zéro de notre hiérarchie esthétique. Détournés avec un degré de violence ou de douceur relative à chaque artiste, ils deviennent des matériaux de la sculpture. Hijack city fait coexister la couleur et l’achrome, le solide et le fragile, le lourd et le léger, l’élévation et l’affaissement, l’informe et le géométrique, le crado et le tout propre. Au milieu de l’escalier, un module de l’installation Dead park de Samir Laghouati-Rashwan se prendra forcément des coups de pieds des visiteurs, il en est conscient. Au fond de la dernière salle, un moulage d’une chaise d’Arnaud Vasseux se casserait si elle tombait, il l’appréhende. Au milieu des espaces d’expositions, ne vous prenez pas une sculpture d’Anita Molinero dans les pieds, c’est vous qui risquez de souffrir. L’exposition évoque cet attrait des artistes pour les qualités plastiques des objets qui les entourent et qu’ils détournent. Et leur capacité à prendre un nouveau sens une fois retravaillés par le moulage, le modelage, l’assemblage ou l’installation. L’exposition convoque une histoire vivante de la sculpture en invitant trois générations différentes d’artistes, produisant un paysage contemporain de l’objet détourné.

Diego Bustamante 2021

Bibliographie

Crédits